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Gouache sur papier du peintre autrichien Aloys Zötl, qu'André Breton associait au Douanier Rousseau, datée de 1839.
Peinture annotée en bas à droite : Alois Zötl pinxit am 14 mürz 1834 ; en bas à gauche : Saugelhire Tab. XIIII ; en bas au centre : « Der berufte Schlankaffe simia pruinosus - Er bewohnt Ostindien und den indischen Archipel. Länge von der Nasenspietze bis zum After zwey Fuss. Synonyme : Springaffe, Houlman Negeraffe ».
« Il suffit de considérer un peu attentivement la façon dont Zötl représent Les Singes et surtout Les Singes anthropoïdes pour convenir que ceux-ci traduisent la nostalgie de "l'homme vivant selon la nature". D'abord, de tous les animaux représentés par Zötl, à peu près seuls Les Singes regardent dans notre direction et même, la plupart du temps, nous font face ; les autres sont généralement vus de profil. Or, non seulement Les Singes nous regardent et nous prennent à témoin, mais ils ont seuls le privilège, quoique dans un petit nombre d'œuvres, de nous montrer leur pénis... Cela dès Le Grand Macaque de 1836, où le pénis occupe symboliquement le centre de la composition, et jusqu'à celui de 1887, l'année même de la mort de l'artiste. C'est dire la constance de la revendication qui s'exprime ici, revendication à une sexualité non réprimée que légitime l'harmonie avec la nature. Avant même que cette revendication-là ait trouvé à se formuler, Le Gibbon de droite met bien en évidence ses ongles parfaitement taillés. Mais peut-être du fait d'une promotion trop rapide, ce Gibbon manifeste une assez grande inquiétude tandis que le Houlock ou plutôt les Houlocks de 1835 téloignent d'une souriante sagesse et que leur accord avec la nature environnante prend argument d'une splendide fleur de cactus rapprochée de la tête de l'animal de gauche. La même accueillante sérénité se lit dans le regard du Grand Macaque et dans celui du Semnopithèque de 1839, admirablement inscrit dans l'arabesque dessinée par sa longue queue devant une montagne boisée qui s'arrondit comme un sein de Dame Nature. » José Pierre (Julio Cortazar (texte de), Giovanni Mariotti (introduction de), José Pierre (postface de), Aloys Zötl (1803-1887), Milan, Franco Maria Ricci, 1976, p. 131-133).
Aloys Zötl
« Mais la grande leçon du peintre autrichien, il est bien évident qu'il faut la chercher plutôt dans les œuvres où s'établit, entre l'animal et le décor naturel qui l'environne, une profonde harmonie [...]. Et de ce point de vue de l'harmonie naturelle, c'est tout simplement à la prise en considération des vertus proprement artistiques d'Aloys Zötl que l'on en vient, car c'est dans ses œuvres les plus admirables qu'il parvient à tresser les "correspondances" les plus convaincantes entre les êtres et le paysage, cela n'étant possible qu'en mettant à contribution une intuition proprement poétique faute de laquelle la documentation puisée par lui dans les ouvrages d'histoire naturelle ou les récits de voyages serait demeurée lettre morte. Ce qui revient à dire que les qualités plastiques sont ici inséparables des qualités du cœur et de l'esprit, chose que l'on a trop peu l'occasion de dire aujourd'hui en présence du dessèchement général de ce qui se propose le plus souvent sous l'étiquette de l'"avant-garde". Mais alors comment choisir entre tant de merveilles ? Tant pis ! Je propose ici mon choix personnel qui, loin de se vouloir autoritaire et définitif, est au contraire invitation à tout un chacun à dresser le sien, d'abord parce que la beauté est affaire personnelle [...] et ensuite parce que les affinités que nous pouvons ressentir à l'égard de telle ou telle espèce animale procèdent de raisons qui échappent souvent à notre conscience.
« J'aime [...] Le Semnopithèque de 1839..., La Loutre et Rana varia (l'un des plus beaux Max Ernst que je sache) de 1863, [...] Le Rhinocéros de 1872 (ô puissante merveille de lourdeur et de grâce) [...].
« Mais par-dessus toutes ces incontestables réussites je mettrais trois œuvres qui valent par des qualités très différentes : Le Caïman de 1849 tout d'abord qui, à mes yeux, est le chef-d'œuvre des chefs-d'œuvre, tant par la prodigieuse invention de chaque détail que par la rigueur poétique absolue de sa composition ; puis un animal fort peu exotique d'allure puisqu'il s'agit de L'Ondatra musqué de 1871, dont je goûte au contraire l'extrême simplicité de la mise en page et l'égalité d'importance qui s'établit entre le corps de l'animal et l'îlot où il a pris place ; enfin Les Paresseux de 1874 en raison du foisonnement baroque de sa végétation autour d'eux, de la diversité des attitudes et de je ne sais quelle sympathie que je devine ici entre les animaux et végétaux. Faut-il ajouter que dans toutes ces œuvres, le pinceau d'Aloys Zötl établit tout naturellement des affinités entre les herbes et les poils, des "rimes" entre tel organe [...] et telle fleur. Et jamais l'aquarelle sans doute n'avait été aussi fidèle à ses vertus de transparence habituelle en se découvrant de si grandes possibilités pour évoquer la douceur des pelages et des plumages.
« Julio Cortazar illustre superbement dans le présent ouvrage l'affirmation du poète selon laquelle "le règne animal...entretient en chacun de nous" une "énigme" et qu'il "joue" un "rôle primordial" dans notre "symbolisme inconscient". Et peut-être revient-il à chaque lecteur de ce livre de choisir avec quel animal d'Aloys Zötl il lui serait possible, comme l'écrivain argentin avec son fameux Axolotl, d'échanger sa place. » José Pierre (Julio Cortazar (texte de), Giovanni Mariotti (introduction de), José Pierre (postface de), Aloys Zötl (1803-1887), Milan, Franco Maria Ricci, 1976, p. 140-144).
Expositions
- Wien, Österreichisches Museum für angewandte Kunst
- Zürich, Kunsthaus Zürich
- Bruxelles, Palais des Beaux-Arts, L'Autriche visionnaire, 1996/1998, s.p., s.n° (étiquette au dos)
- Jérusalem, Musée d'israël, Dada Surrealism and Beyond in the Israel Museum, 2007.
Bibliographie
- Julio Cortazar (texte de), Giovanni Mariotti (introduction de), José Pierre (postface de), Aloys Zötl (1803-1887), Milan, Franco Maria Ricci, 1976, rep.p. 55, pp.131-133, p. 141, p. 146
- Kamien-Kazhdan, Adina, Surrealism and Beyond in the Israel Museum, Jerusalem, 2007
Date de création | 1839 |
Date d'édition | 1839 |
Langues | français |
Notes | 38,1 x 47 cm (15 x 18 1/2 in.) - Gouache sur papier |
Musée | |
Vente Breton 2003 | Lot 4431 |
Mots-clés | art brut ou naïf, peinture |
Catégories | Œuvres graphiques |
Lien permanent | https://www.andrebreton.fr/fr/work/56600100179070 |