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Aristoloches

Dessins

Auteur

Artiste Aloïse Corbaz, dite Aloïse

Descriptif

Dessin sur papier recto-verso au crayon de couleur. Œuvre associée à l'art brut.

Crayons de couleurs sur 4 feuilles jointes (dessin double face) marqué au milieu à gauche : « Feuille d'acanthe », et en bas à droite : « Aristoloches glycine ». Marqué au dos : « Lit nuptial du Roi Œdipe et son Sphinx. Mains de Prométhée. »

Aloïse
« Voilà ce que suggère justement l'art d'Aloïse : une vaste épopée dans laquelle rien ne saurait imposer clôture. Et, curieusement, une épopée dans laquelle tous les faits et éléments d'un monde défilent sous les espèces de leurs fantômes nominaux et totalement exsangues. Un monde de doublures, une épopée de la doublure du monde.

» Et quel est ce monde que célèbre interminablement la fresque ininterrompue d'Aloïse ? C'est très particulièrement la cosmogonie d'une femme. Si confinée qu'elle soit devenue dans la zone incorporelle des idées, si étrangère à toute chair et vie réelle, si aliénée, Aloïse est demeurée femme et l'est même peut-être plus intégralement qu'une autre pour s'être toujours si opiniâtrement refusée à aucun contact ou échange. Le peuplement de son empyrée est fait des éléments — couronnes de roses, fastes nuptiaux, amours légendaires, brocards et ruissellements de pierreries — qui sont les grandes ailes du moulin des filles et dont les peintures d'Aloïse me paraissent être la seule solennisation qui en ait jamais été faite — du moins veux-je dire avec telle autorité. »
Jean Dubuffet (« Haut art d'Aloïse », In : L’Art brut, fascicule 7 (Aloïse), 1966, p. 15)

Art brut
« Dans ce véritable manifeste de l'Art brut que constitue la notice datée d'octobre 1948, notre ami Jean Dubuffet insiste on ne peut plus justement sur l'intérêt et la spéciale sympathie que nous portons aux œuvres qui "ont pour auteurs des gens considérés comme malades mentaux et internés dans des établissements psychiatriques". Il va sans dire que je m'associe pleinement à ses déclarations : "Les raisons pour lesquelles un homme est réputé inapte à la vie sociale nous paraissent d'un ordre que nous n'avons pas à retenir." Je me déclare en non moins parfait accord avec Lo Duca, auteur d'un remarquable article intitulé L'Art et les Fous qu'on m'a communiqué sans malheureusement pouvoir m'en indiquer la référence et dont je me bornerai à citer ces fragments : "Dans un monde écrasé par la mégalomanie et l'orgueil, par la mythomanie et la mauvaise foi, la notion de folie est bien imprécise." On a d'ailleurs remarqué qu'un nombre excessivement restreint de mégalomanes est soigné par les psychiatres. En effet, dès que la folie devient collective - ou se manifeste par le truchement de la collectivité - elle devient taboue... A nos yeux, le fou authentique se manifeste par des expressions admirables où jamais il n'est contraint, ou étouffé, par le but raisonnable. Cette liberté absolue confère à l'art de ces malades une grandeur que nous ne retrouvons avec certitude que chez les Primitifs...

» Il est à observer qu'une gêne croissante, dès qu'il s'agit de la place à faire à de telles œuvres, n'a cessé depuis un demi-siècle de s'exprimer dans les milieux psychiatriques - soit dans un cercle où pourtant ces œuvres étaient essentiellement considérées en fonction de leur valeur clinique. Déjà dans son ouvrage L'Art chez les fous, publié en 1905, Marcel Réja s'oppose à ce que leur qualité maladive les fasse tenir pour "des choses hors cadre, sans rapport avec la norme" et se montre sensible à la beauté de certaines d'entre elles. Hans Prinzhorn (Bildnerei des Geistenkranken, 1922) en révélant celles qui lui paraissent les plus remarquables - notamment d'August Neter, de Hermann Beil, de Joseph Sell et de Wölfli - et en leur assurant une présentation pour la première fois digne d'elles, appelle leur confrontation avec les autres œuvres contemporaines, confrontation qui, sous bien des rapports, tourne au désavantage de celles-ci...

» Je ne craindrai pas d'avancer l'idée, paradoxale seulement à première vue, que l'art de ceux qu'on range dans la catégorie des malades mentaux constitue un réservoir de santé morale. Il échappe en effet à tout ce qui tend à fausser le témoignage qui nous occupe et qui est de l'ordre des influences extérieures, des calculs, du succès ou des déceptions rencontrées sur le plan social, etc. Les mécanismes de la création artistique sont ici libérés de toute entrave. Par un bouleversant effet dialectique, la claustration, le renoncement à tous profits comme à toutes vanités, en dépit de ce qu'ils présentent individuellement de pathétique, sont ici les garants de l'authenticité totale qui fait défaut partout ailleurs et dont nous sommes de jour en jour plus altérés. »
André Breton (Le Surréalisme et la peinture, Nouvelle édition revue et corrigée, 1928-1965, Paris, Gallimard, 1965, pp.313-316)

Languesfrançais
Notes49 x 65,6 cm (19 1/4 x 25 7/8 in.) - Crayons de couleurs sur 4 feuilles jointes (dessin double face), sd
Vente Breton 2003Lot 4023
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Lien permanenthttps://www.andrebreton.fr/fr/work/56600100894230