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Huile sur panneau avec cadre. Peinture réalisée en 1947 et offerte à André Breton. Le cadre a été ajouté ultérieurement par l'artiste.
Signée en bas à droite : Fernandez ; dédicacée au dos : Tout petit hommage de mon affection et mon admiration profondes à l'homme et au poète André Breton, Luis Fernàndez 9 - 12 - 47.
« J'ai témoigné naguère, sur ma propre expérience, qu'un poème, soustrait à toute volonté consciente de signification en tant que produit de l'écriture automatique ou inspirée, pouvait soudain se charger de sens en fonction d'un événement ultérieur, que ce poème tendait à préfigurer dans son déroulement et ses moindres détails : j'ai commenté un tel poème - "Tournesol" - dans l'Amour fou. Le plus remarquable exemple de prémonition qui, jusque-là, eût été enregistré dans l'art était le fait (ne laissant rien à désirer sous le rapport de la vérification objective) que Chirico, exécutant le portrait d'Apollinaire longtemps avant sa blessure, avait cerclé la tempe que le poète, à la suite de sa trépanation, devait être amené à dissimuler sous un disque de cuir (à l'époque où il peignit ce tableau on sait quelle importance prenaient pour Chirico les préoccupations divinatoires).
« À nouveau le problème de l'élucidation d'un tel phénomène allait se poser en considération de l'accident subi en 1938 par Victor Brauner qui lui coûta la perte d'un œil : il était indiscutable que nombre de ses peintures et dessins des années précédentes traduisaient la hantise d'une mutilation oculaire. Pierre Mabille, à qui l'on doit une importante communication à ce sujet ("L'œil du peintre", Minotaure n° 12-13, mai 1939), se déclare en peine de décider si l'accident, en quelque sorte, "était écrit" depuis des années, c'est-à-dire existait à l'état virtuel et s'était "préparé" un terrain assez favorable pour éveiller une prémonition de l'ordre le plus insistant ou si les formes mutilées que dessinait Brauner n'avaient pas "mis en œuvre des forces magiques, créé un climat psychique dont l'accident devait être le terme inéluctable".
« Depuis lors, rien n'avait plus été signalé qui, dans les rapports de la création artistique et de la vie, obligeât à faire intervenir cette autre dimension, inconnue dont John W. Dune (cf. Le temps et le rêve, éd. du Seuil, 1948) nous invite à chercher le secret dans le temps sériel...
« Il est frappant qu'encore une fois ce soit une circonstance dramatique - la mort de sa femme - qui place aujourd'hui notre ami Luis Fernandez sous le rayon de ce phare, aux très longues durées d'occultation.
« Il me pardonnera, j'espère, de ne pas garder pour moi seul sa trop émouvante lettre du 26 septembre dernier, où il me confiait que, sans, bien entendu, accorder le moindre crédit au spiritisme ni placer la moindre foi dans aucune religion, il ne pouvait douter que l'être disparu continuait à vivre "en dedans" de lui-même et que c'était à sa demande qu'il m'écrivait. Au peu de consolation que j'essayai de lui apporter, il répond le 30 septembre en ces termes :
« Il y a une chose étonnante dans votre lettre. Je copie le fragment entier : "Il est encore tout proche le moment où le petit carton blanc (de faire-part, reçu quelques jours plus tôt) m'a laissé un instant médusé. Mon premier mouvement a été d'aller revoir de près le paysage que j'ai de vous, de remonter lentement la route qui le traverse pour aller se perdre entre deux massifs de verdure et c'était comme si j'avais voulu faire à Esther ce bout de conduite..."
« (Ce paysage, qu'il avait choisi pour me l'offrir il y a quelques années, a été peint dans la Gironde, où Fernandez passe les vacances et se trouve encore. Un jour qu'il vint me le demander pour une exposition, il manifesta une grande agitation en le revoyant, assurant qu'il ne parvenait pas à le reconnaître. Il me le rendit au bout de plusieurs mois, revêtu d'un cadre noir qui triplait au moins sa hauteur et m'effraya quelque peu...)
« Or, - poursuit Luis Fernandez - c'est exactement la route que nous avons remontée lentement pour accompagner le corps d'Esther jusqu'à l'endroit où il est maintenant, derrière les deux massifs de verdure, à un kilomètre environ de ceux-ci et, si l'on regarde le petit tableau, dans le prolongement (à peu près exactement, ou exactement) de la route ». André Breton (« Le pont suspendu », in Medium, Nouvelle série n° 4, janvier 1955, p. 37).
Expositions
- Paris, Galerie Pierre, Exposition Louis Fernandez, 1950, n° 4
- Paris, Centre national d'art contemporain, Luis Fernandez, 1972, rep.p. 53
- Paris, Musée national d'art moderne/Centre Georges Pompidou, André Breton, la beauté convulsive, rep.p. 414, p. 487
Bibliography
- André Breton, « Le pont suspendu », in : Medium, nouvelle série n° 4, janvier 1955, rep.p. 32, p. 37.
Creation date | 1947 |
Date of publication | 1947 |
Languages | French |
Physical description | 12 x 22 cm (sans le cadre) (4 3/4 x 8 1 5/8 in.) - Huile sur panneau, cadre par l'artiste |
From / Provenance | Don de l'artiste |
Breton Auction, 2003 | Lot 4279 |
Keywords | Divination, Painting |
Categories | Modern Paintings |
Permanent link | https://www.andrebreton.fr/en/work/56600100647100 |